Société
Humain : à l’abandon
Édito — il y a 6 années
Temps de lecture: 2 minutes
L'humain en mode tech.
Pas un jour, sans entendre parler de sens et d’humain, mais plus un jour sans entendre parler de machines, de robots, d'intelligence artificielle et de concept d’humain augmenté.
L’imagination en mode tech
Inventer, créer, disrupter (avec de la chance et du talent) des pratiques, des habitudes, des attitudes pour espérer provoquer un changement ou une amélioration, c’est chouette ! Cela donne le sentiment de ne pas être un pion, mais un cerveau qui pense, qui crée pour faire la différence.
Alors, l’émulation technologique est une bénédiction car les uns et les autres sont en ébullition, en quête d’une heureuse rupture pour venir en appui d’une industrie, la bousculer, en changer les règles pour accélérer, réinventer un modèle économique et influencer tout un écosystème naissant ou sénescent avec un réveil possible.
Le courage en mode tech.
En revanche, ce qui interroge c’est l’invasion de la technologie dans les métiers humains.
Comme si les cerveaux et les intelligences étaient grillés, incapables de penser contre eux-mêmes pour raisonner avec pertinence, rationalité et lucidité pour développer d’autres pratiques, des meilleures, des nouvelles.
L’écosystème fonctionne comme si les humains ne pouvaient pas faire leur aggiornamento. Donc, on célèbre l’humain à grand renforts de data, de clicks, de plateformes pour se raconter sans se parler. Comme si la barrière virtuelle allait désinhiber la parole voire la libérer pour qu’enfin nous puissions appuyer sur les bons boutons pour réparer l’humain qui boite ; l’humain défaillant dans les entreprises qui ne sait plus écouter, entendre, comprendre, sentir et apporter des solutions pour adoucir les mœurs du travail et apporter de la joie sinon de la paix pour refaire communauté ensemble, au moins dans les entreprises.
L’humain en mode tech
Mais, il y a tout de même une bizarrerie ; nous célébrons bruyamment le sacre des machines en guise de sacre de l’humain. Au lieu de nous parler, nous codons, au lieu de débattre, nous répondons à des questionnaires en ligne, au lieu de changer en profondeur, nous laissons les machines peu à peu modifier des zones de notre cerveau et donc in fine nous changeons de manière cognitive, malgré nous et presque sans effort.
Mais pouvons-nous être fiers de cela ? N’avons-nous pas suffisamment de courage et d’humilité pour nous regarder avec lucidité et changer enfin, parce qu’il le faut ? Avons-nous à ce point besoin d’une béquille technologique pour penser l’homme, l’humain, à une ère qui célèbre précisément l’humain et le sens ?
Quel est donc ce message que nous nous adressons à nous-mêmes ? Quel est le sens de cette délégation de transformation humaine aux machines ? Avons-nous déjà cédé ? Les machines ont-elles déjà gagné ? Avons-nous déjà été vaincus par la technologie ou pouvons-nous encore faire un effort pour donner le meilleur de nous-mêmes ? Avons-nous le désir d’être influencés par la culture des robots et d'ailleurs, quelle est la culture des robots ?
Il s’agit à l’évidence de repenser l’esthétique de la transformation, à l’aune de l’éthique de la transformation, et je dirais même plus, de l’éthique du courage.