Série d'été
Le prix du pouvoir
Publications — il y a 4 années
❛Presque tous les hommes peuvent faire face à l’adversité. Si vous voulez éprouver le caractère d’un homme, donnez-lui le pouvoir.❜ Abraham Lincoln
L'éthique
Pour reprendre les propres mots de John F. Kennedy lors de son discours d’investiture à la présidence, le 20 janvier 1961, ce qui se joue avec la politique et plus globalement avec le pouvoir, c’est de ❛transformer nos bonnes paroles en faits, dans une alliance nouvelle en faveur du progrès, d’aider les hommes libres et les gouvernements libres à se libérer des chaînes de la pauvreté.❜
Mais qu’est-ce que le progrès ? C’est une des réponses que tout dirigeant (politique) a la charge d’apporter tout au long de ses mandats. Et, cette réponse est un douloureux combat avec l’éthique qui, dans bien des circonstances, montre sa dimension impressionniste. Les notions sont relatives selon le moment, la culture, l’urgence de la situation ou bien d’autres contextes.
Ce postulat étant posé, il s’agit de ne jamais cesser de réaffirmer, jour après jour, la cohérence de ses valeurs ; elles sont un socle de références qui donne un cap à l’action.
Les valeurs donnent du sens aux choix ; elle protègent des mauvaises décisions et donnent de la force aux bons arbitrages, en dépit de l’âpreté de certaines batailles à mener pour gagner les guerres.
Ce sont précisément les valeurs qui fondent le pilier de l’héritage d’une séquence, d’un moment de vie, au cours duquel le pouvoir était entre nos mains.
Mais diriger avec vertu, n’est pas sans prix à payer.
La solitude
Tout d’abord, le pouvoir est le creuset des batailles d’idées et des guerres d’intérêts. Cependant, pour rester dans l’esprit du Président Kennedy, ❛ne négocions jamais sous l’emprise de la peur. Mais n’ayons jamais peur de négocier.❜
Le pouvoir crée une immense solitude car un grand nombre d’individus attendent quelque chose du pouvoir et tire les ficelles de manière morale, immorale ou amorale pour parvenir à leurs fins. Sauf qu’à la fin, c’est bien celui ou celle qui prend les décisions qui porte la responsabilité d’un succès ou d’une débâcle.
Aussi, il faut réussir à trouver la bonne dynamique sur l’échiquier politique et observer le moment où il faut user de stratégie ou de tactique pour influencer de manière efficace l’ordre des choses.
Diriger exige la plus grande lucidité pour ne pas se laisser tordre par les plus féroces ou duper par les vieux singes. C’est donc un exercice d’humilité où il est bon de ne sous-estimer personne. Il faut négocier autour de la table et faire naître le meilleur compromis pour résoudre les problèmes dont vous avez la charge.
Alors quelle science du compromis ? Qu’est-ce qu’une bonne écoute ? Comment écouter ? À quel moment est-il nécessaire de trancher pour valider une trajectoire, tout en créant l’unité, en dépit des vents contraires ?
Exercer le pouvoir sérieusement demande un véritable engagement qui n’est pas sans dommages collatéraux.
L'équilibre
Sur la scène politique aussi bien que sur la scène économique, les gens espèrent beaucoup. Ceux qui n’ont pas le pouvoir espèrent que ceux qui l’ont sauront l’exercer convenablement pour construire ❛un nouveau monde de droit, un monde dans lequel le fort est juste, le faible vit en sécurité et la paix est préservée.❜ pour poursuivre avec la philosophie du Président Kennedy.
Et, il nous faut reconnaître que faire cela demande du temps, du courage et des sacrifices, souvent personnels. L’engagement qu’implique le désir de changer le monde pour en faire un endroit plus juste, plus inspirant et qui offre à chacun le droit de vivre une meilleure vie, est un vrai sacerdoce.
Cette mission demande de se donner corps et âme à son but, au prix d’un lourd tribut humain et émotionnel ; c’est du temps pour soi sacrifié, des souvenirs contrariés avec la famille, une absence difficilement négociable auprès des siens.
Il faut encore compter le poids de l’exemplarité et, par capillarité, ce que cela signifie pour les proches. Diriger, a fortiori au plus haut niveau, ce sont les ors, mais aussi la charge morale et matérielle du devoir à accomplir.
À l’heure où les conflits sociaux éclatent partout dans le monde avec des citoyens réclamant, de manière universelle, plus d’égalité, les dirigeants (politiques et économiques) sont au centre de l’attention. Ils sont la cible de la colère, mais cela ne résoudra pas grand chose car ils ne pourront pas transformer ce monde tous seuls.
Ils doivent naturellement faire leur aggiornamento et regarder en face ce qu’il faut changer, abandonner, créer ou développer, mais ils doivent également avoir le courage de dire ceci : ❛Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous ; demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.❜ Ils peuvent aller plus loin et oser affirmer encore ceci : ❛Chers citoyens du monde, ne vous demandez pas ce que le monde peut faire pour vous, mais ce qu’ensemble nous pouvons faire pour la liberté des hommes.❜
C’était l’hymne à l’action, au courage et à l’engagement de John F. Kennedy qui raisonne encore dans nos têtes, des années plus tard, alors que collectivement nous avons progressé et, en même temps, failli.