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Hubris - Leadership - Force - Pouvoir - Dirigeant - Gouvernance - Russie _ Ukraine - Vladimir Poutine - Hanna Arendt -

Pouvoir

À l’épreuve de l’hubris

Édito — il y a 1 année

L’hubris est un risque, une menace et une fracture qui menace toujours les fondations.

Une force…

Le théâtre de guerre déclaré par la Russie, sous l’autorité de Vladimir Poutine, entraîne différentes questions. Il sonde tout d’abord la notion même de leader fort, avant d’interroger la dérive du pouvoir sous les traits de l’hubris, pour tenter d’expliquer ce que nous ne comprenons pas, en termes de dérive et de ce qui est en jeu : la paix ou la guerre, au-delà de l’Ukraine ? 

Alors, qu’est-ce qu’être fort ? Hannah Arendt répondrait : c’est l’autorité qui augmente. 

La force est moins qu’un ordre et plus qu’un conseil ; la force symbolise la puissance, non pas celle des faibles qui utilisent la peur pour asseoir leur autorité, mais celle qui fait grandir son dépositaire et ceux qui s’y soumettent. 

La force révèle l’idée de l’utilité ; pour quoi faire ? Embarquer des personnes dans un noble dessein et développer les gens. Mais cette confiance presqu’aveugle oblige ; elle se mérite et nourrit sa docilité au confluent de la fiabilité et de la loyauté. Un leader fort jouit d’une légitimité naturelle et s’exprime par son courage et son exemplarité. C’est un dirigeant qui ose prendre des décisions nécessaires, mais difficiles, au nom du bien commun. 

C’est une personne qui rassure de par son expérience, certains diront son âge, mais ce n’est pas indispensable ; l’endossement d’un pouvoir formel et régulier compte aussi bien que l’expression d’une parole forte et responsable, empreinte de l’autorité de l’argument. 

La force d’un dirigeant s’exprime lorsque son courage fait lien avec le sens et les autres ; nous sommes loin d’un pouvoir narcissique et d’une détermination que rien n’arrête. C’est un pouvoir puissant, mais humble ; un pouvoir qui tranche, mais qui écoute. 

Cependant, diriger est parfois si dur et galvanisant que certains se perdent et se noient dans un processus de déshumanisation qui entraîne une faillite cognitive, au point de menacer le pouvoir lui-même et bien-sûr les autres. 

 

… mortifère 

Mais quel pouvoir a le pouvoir sur ceux qui l’exercent ? Dans le cadre du conflit russo-ukrainien, certains parlent de la santé mentale de Vladimir Poutine pour éclairer partiellement ses décisions. Nous entendons parler de paranoïa ; la longueur des tables autour desquelles il anime ses réunions laissent à penser qu’il ne veut pas être approché. Certains parlent du risque covid ; mais d’autres pourraient penser à un péril d’un autre genre. 

Mais ne devrait-on pas évaluer la santé mentale de tout dirigeant ? L’ère Trump avait déjà posé ce débat sur la table. Qu’il s’agisse d’un État ou d’une entreprise, n’a-t-on pas le droit d’interroger la santé mentale de ceux qui seront à même de prendre des décisions qui engagent l’avenir, sinon le destin d’un collectif, a fortiori d’un pays ? Ne serait-il pas utile de savoir si la capacité de jugement est totale ? 

Cette question est fondamentale pour organiser les garde-fous d’un dirigeant qui sombrerait dans l’hubris. Mais de quoi s’agit-il ? Le syndrome d’hubris est une maladie du pouvoir qui affecte la santé mentale des dirigeants ; le terme de narcissisme pathologique permet d’imaginer de quoi il retourne. Cette affliction entame la prise de décision rationnelle tant le pouvoir monte à la tête de celui qui dirige. Les signaux sont clairs : le dirigeant s’isole et les équipes sont terrorisées à l’idée d’exprimer non seulement des faits, mais des désaccords ; le dirigeant s’enferme alors dans une démesure exponentielle. 

Arrogance, prétention, égotisme, manipulation, mensonge, mépris sont des mots qui caractérisent bien l’état de dirigeance sous le joug de l’hubris ; ce syndrome renvoie également à un sentiment d’invulnérabilité, d’invincibilité ou tout simplement de toute puissance. Et ces comportements déviants sont visibles de tous, sauf du principal intéressé et de ses fidèles ; le pire étant quand l’entourage proche constate également et désespérément cette fragilité cognitive. 

 

Lutter contre 

Ainsi, quand l’hubris est caractérisé, il est urgent d’agir pour remettre le pouvoir sous contrôle car le commun est en péril ; l’hubris offre une place disproportionnée à l’image et à l’apparence, donne une confiance excessive dans son propre jugement, entraîne une méfiance structurelle des critiques et des conseils des autres et un mépris général pour autrui. 

Il s’agit alors de juguler une dérive autocrate qui tend naturellement à concentrer tous les pouvoirs et à saper les organes régulateurs du pouvoir afin d’avoir les coudées franches pour persister dans des choix critiquables, en annihilant le dialogue, la contradiction et la nuance. Tout est polarisé dans un tragique « avec moi ou contre moi » qui structure une ambiance mortifère et mécaniquement un parfum de défaite. 

Alors comment ne pas subir ? Dans une entreprise, la gouvernance peut venir au secours d’une telle incompétence hubristique. C’est la raison pour laquelle, il est sage de ne pas attendre l’explosion d’une crise pour veiller à un équilibre des pouvoirs avec des mécanismes de régulation protéiformes, sans toutefois se départir de la nécessité d’avoir des équipes courageuses, au moins au moment critique, avant qu’il ne devienne tragique.

Sur le plan politique, c’est plus compliqué car en dépit d’institutions solides garantes du partage du pouvoir, un dirigeant frappé d’hubris peut décider de les braquer pour asseoir son pouvoir, sinon son règne ; et dans ces moments-là, beaucoup disent, non sans cynisme, qu’il n’y a rien de plus efficace qu’une bonne guerre. Or, la guerre précisément est un révélateur dramatique de l’hubris entraîné alors dans un cercle vicieux articulé autour de la paranoïa, d’une très faible, sinon inexistante tolérance à la frustration, d’une agressivité certaine et d’un manque patent d’empathie ; l’enjeu étant de ne pas subir, rien, mais au contraire de faire endurer les autres, parfois jusqu’à l’irréparable car le pouvoir est alors intoxiqué. C’est à ce moment que le peuple, même tétanisé, peut, à travers la révolte, jouer tout son rôle, en tentant une action régulatrice pour changer d’homme et/ou de régime. 

Et la communauté internationale peut être un appui diplomatique ou coercitif, au moyen de sanctions économiques et financières, voire d’une action militaire. Trouver alors la bonne distance entre le « poker menteur » et le mensonge pur et comprendre l’arc des nuances entre le jeu tactique et géopolitique vs. pathologique est un fondamental sensible.

L’hubris est un risque, une menace et une fracture qui menace toujours les fondations. Toujours l’hubris menace la paix ; toujours l’hubris menace la démocratie ; toujours l’hubris menace la prospérité. 

 

Nicole Degbo

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La Cabrik est une fabrik de gouvernance stratégique et humaine qui accompagne les transformations pour relier l'économie à l'humain et est spécialiste des situations de crise de gouvernance.

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