Négociation
Le pouvoir de la négociation
Édito — il y a 3 mois
❛Le match n'est pas fini.❜ Michael Jordan
Une préparation décisive
L’échec de la gauche à obtenir la nomination d’un Premier ministre de gauche, et plus spécialement du Nouveau Front Populaire, signe l’échec de cette phase de négociation.
Malheureusement, c’était une chose prévisible. La gauche qui n’avait pas gagné de scrutin depuis un long moment s’est enivrée de son succès, en oubliant les circonstances du front républicain. Elle est aussitôt tombée dans la fièvre de cette majorité minoritaire et s’est empressée d’imposer des choses qu’elle n’était pas en mesure d’obtenir.
La gauche a négligé deux choses : la politique est aussi une question arithmétique ; et le succès d’une négociation repose sur sa préparation.
Ainsi, en négligeant le registre mathématique de l’étape qui vient de s’achever, elle a fait l’impasse sur l’essentiel : la recherche d’une majorité d’action pour éviter de se confronter à une minorité de blocage. Elle a utilisé l’injonction et la menace en guise d’arguments au lieu de travailler méthodiquement les fondamentaux de sa victoire.
S'agissant de la réflexion stratégique et tactique, elle n’a jamais été mise en place car la gauche a manqué de recul dès le début ; elle a eu un problème de lucidité qui l’a amenée à s’appuyer sur des hypothèses fausses.
Elle n’a jamais su sortir l’ego de l’équation et s’est enfermée dans des positions dogmatiques incompatibles avec l’exercice indispensable d’évaluation objective de la situation et notamment de la réalité du rapport de force.
La gauche se croyait forte et maître du jeu ; or, ce n’était pas le cas. Elle l’aurait su si elle avait pris le temps de se poser les bonnes questions et de challenger le Une préparation décisive
L’échec de la gauche à obtenir la nomination d’un Premier ministre de gauche, et plus spécialement du Nouveau Front Populaire, signe l’échec de cette phase de négociation.
Malheureusement, c’était une chose prévisible. La gauche qui n’avait pas gagné de scrutin depuis un long moment s’est enivrée de son succès, en oubliant les circonstances du front républicain. Elle est aussitôt tombée dans la fièvre de cette majorité minoritaire et s’est empressée d’imposer des choses qu’elle n’était pas en mesure d’obtenir.
La gauche a négligé deux choses : la politique est aussi une question arithmétique ; et le succès d’une négociation repose sur sa préparation.
Ainsi, en négligeant le registre mathématique de l’étape qui vient de s’achever, elle a fait l’impasse sur l’essentiel : la recherche d’une majorité d’action pour éviter de se confronter à une minorité de blocage. Elle a utilisé l’injonction et la menace en guise d’arguments au lieu de travailler méthodiquement les fondamentaux de sa victoire.
S'agissant de la réflexion stratégique et tactique, elle n’a jamais été mise en place car la gauche a manqué de recul dès le début ; elle a eu un problème de lucidité qui l’a amenée à s’appuyer sur des hypothèses fausses.
Elle n’a jamais su sortir l’ego de l’équation et s’est enfermée dans des positions dogmatiques incompatibles avec l’exercice indispensable d’évaluation objective de la situation et notamment de la réalité du rapport de force.
La gauche se croyait forte et maître du jeu ; or, ce n’était pas le cas. Elle l’aurait su si elle avait pris le temps de se poser les bonnes questions et de challenger le statu quo. Au contraire, elle s’est mise à la merci de ses pulsions destructrices et a posé des frontières dont elle ne maîtrisait pas la dynamique. Le résultat est un échec cinglant qu’elle choisit d’imputer au reste de la classe politique.
Un (en)jeu maîtrisé
La gauche a très certainement omis de valider l’enjeu de cette phase politique, mais également l’alignement de l’ensemble de la coalition autour de cet enjeu. La conséquence est qu’elle a affiché une position qui manquait dès le départ de crédibilité et dont les gains espérés étaient flous.
Voilà pourquoi tout a déraillé au vu et au su de tous, mais sans la clairvoyance de la gauche elle-même. Elle s’est noyée dans une position radicale que le président a su retourner contre elle, sans jamais clarifier le fil directeur de sa propre séquence. Nous savions évidemment que le président était en quête d’un premier ministre, mais personne n’a su deviner les critères qu’il privilégierait. Certains ont eu l’impression d’être victimes de sa perversité alors qu’il a montré qu’en dépit des circonstances et de la tension, il restait focalisé sur les moyens à sa disposition pour protéger son pouvoir d’agir ; son but étant de transformer une situation dégradée en un compromis acceptable.
La gauche s’est enfermée dans un cercle vicieux de menaces, d’ultimatums, d’attaques personnelles et de demandes non-réalistes qui ont abouti à un refus de négocier ; c'était la chronique d’un échec annoncé.
Elle a manqué d’entrainement et de rigueur pour mener la danse. Elle n’a pas su voir ses facteurs de vulnérabilité. Ainsi, elle a glissé progressivement dans un rapport de force défavorable car elle n’avait ni une vison claire de la situation, ni une bonne compréhension de la personnalité du protagoniste principal.
Le résultat est la nomination de Michel Barnier qui ne signe pas l’échec d’Emmanuel Macron, mais montre au contraire son habileté dans la négociation. Nous avons entendu beaucoup de commentaires pour essayer de décrypter son jeu, mais personne au fond ne savait. Il a géré la séquence sensible et hautement périlleuse dans le respect de l’agenda qu’il s’était fixé.
La limite de ce succès est l’immense solitude du président qui semble avoir jouer une partie tellement solitaire que même ses collaborateurs les plus proches ont été non seulement déstabilisés, mais largués.
Sur le plan politique, cet homme si souvent enterré montre encore une fois, qu’il maîtrise son jeu car il réfléchit vite avec une vision globale et documenté du tableau, teste certaines hypothèses et en déploie d’autres beaucoup plus discrètement avant d'acter sa décision. Il triangule et bouge avec une agilité que certains confondent avec de l'erratisme.
Il a une forme de virtuosité dans l’art de le négociation que personne ne semble comprendre et qui rend les gens littéralement fous de rage, mais qui confirme une chose simple : le pouvoir de la négociation.
Cette séquence politique montre comment il est possible de rétablir une forme d’équilibre avec un (en)jeu reposant au départ sur un rapport de force défavorable. La négociation est un plat qui se mange froid et qui demande en amont beaucoup de travail, de préparation et de maîtrise émotionnelle.
Comme dirait Michael Jordan, jusqu'à la fin, le match n'est pas fini. C'est l'enseignement du pouvoir de la négociation.
Nicole Degbo
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La Cabrik est une fabrik de gouvernance stratégique et humaine qui accompagne les transformations pour relier l'économie à l'humain et est spécialiste des situations de crise de gouvernance.