Égalité
Kramer vs. Kramer
Édito — il y a 6 années
Temps de lecture: 2 minutes
Kramer vs Kramer : un voyage vers un féminisme insoupçonné.
Sexisme
Ce film démarre par des plans séquences montrant le choc de deux réalités : la femme vs l’homme.
L’homme ne doute de rien, d’ailleurs il n’écoute pas sa femme et ne voit rien.
Il est forcé de s’arrêter à l’annonce de la séparation - improbable à ses yeux -. Il reste interdit et pense qu’elle n’a pas pu y penser toute seule et imagine spontanément un complot féministe pour l’enquiquiner dans sa vie et venir perturber son ascension professionnelle. Passé le choc, il est forcé de réfléchir et de réorganiser sa vie dans l’urgence.
Elle est en lambeau ; elle ne sait plus qui elle est. Une seule certitude : elle n’est pas heureuse et aspire à se réaliser dans sa vie.
Le mari s’insurge naturellement et pense clairement : "Non mais, de quel droit ?" En effet, il se persuade un temps que le statut de mère et d’épouse devrait suffire à faire le bonheur d’une femme.
Égalité
La seconde phase est intéressante.
Elle montre un homme démuni qui ouvre les yeux sur le travail non rémunéré d’une maman. Il est déboussolé, impatient même avec son enfant, mais choisit de faire ce qu’il faut pour le protéger et le consoler du choc d’un abandon incompris et vécu brutalement.
Peu à peu, il réorganise son quotidien, rebalance ses priorités, se met à portée d’écoute et s’invente une nouvelle vie. Il découvre les parcs de loisirs, invente les rituels du matin et du soir, construit son autorité de père, mais en réalité sa légitimité de père. Il abandonne alors les after work et fait face à l’incrédulité d’un patron qui ne comprend pas pourquoi il se transforme peu à peu en maman, alors qu’il devient tout simplement un père.
Il finit par se mettre en danger au travail où il abandonne, de force puis de gré, l’image d’une performance exemplaire car il ne sacrifie plus sa vie de famille à son ambition personnelle.
Ce désir d’être un bon père entre en collision avec son ascension professionnelle, jusqu’à la perte de son travail.
Féminisme
Vient ensuite le troisième volet qui montre un père en guerre contre une mère. Le sexiste de départ se transforme en père de combat.
Il trouve un travail en dessous de ses aptitudes et moins rémunéré pour avoir la garde de son enfant. Le merveilleux est qu’il plaide ses droits de père. Il défend ardemment son nouvel équilibre trouvé avec son fils ; il clame haut et fort sa place de père et son rôle de protecteur.
Il va à l’encontre des tabous. Il fustige le droit naturel d’une mère et revendique le droit naturel d’être un père.
Ce film est intemporel, il ne vieillit pas. Il agite les mêmes noeuds sur l’égalité homme | femme qu’aujourd’hui et montre que la société avance lentement vers une évidence : l’homme et la femme sont deux êtres singuliers, mais chacun a droit à sa place et au fond cela ne se discute pas. Ce récit interroge intelligemment les équilibres et en définitive le rapport famille | travail.
Voilà une histoire d’un magnifique féminisme insoupçonné. Et si c’était contagieux ? Et si nous étions victimes d’une heureuse épidémie ? Et si pour commencer, nous plongions à nouveau gaiement dans Kramer vs Kramer ?
Parce qu’après tout, le féminisme, ce féminisme-là, est une histoire d’éducation, de regard et d’expérience. C’est tout simplement le charme discret d'un féminisme intemporel.