Diversité et inclusion : anticipons un retour de bâton
— il y a 3 semaines
Le choix de la représentativité est le plus puissant narratif d'inclusion pour barrer la route au dangereux backlash qui nous vient d'outre-atlantique.
À l'heure où aux Etats-Unis, certaines entreprises sous influence républicaine se mobilisent contre l'ESG et un activisme méthodique à l'encontre de « l'affirmative action » connaît ses premières victoires, il est plus que nécessaire d'anticiper, en Europe, une forme de « déprogressisme ». Et de réfléchir à des modalités d'inclusion autres que les quotas ou les pressions, plus ou moins agressives, susceptibles de se retourner, tôt ou tard, contre la cause.
Des progrès sont certes notables en matière d'inclusion : il y a davantage de femmes membres de conseils d'administration (48 %) et de comités exécutifs ou de direction (environ 27 %). Mais nous retenons surtout que les femmes ont absolument besoin de la loi pour obtenir ce qu'elles méritent. Phénomène analogue pour les gens issus de la diversité : on ne compte plus ni les associations ni les actions qui viennent au secours de ce segment de la population.
Et pour quels résultats ? Nous gardons en tête l'image de citoyens minorés, ouvertement désavantagés, qui ont là aussi besoin d'aide pour être pris en considération.
Récit de victoires de toutes couleurs et natures
Peut-être est-il temps de changer notre narratif pour intégrer cette partie de la population dans un langage normalisé ? Les femmes sont des talents ordinaires et non d'exception. Les minorités visibles aussi.
A l'origine, tout part d'une bonne intention, mais c'est usant de voir défiler quantité de « posts » et articles relatifs aux inégalités liées au genre ou aux origines. Or nous avons absolument besoin d'un narratif positif et inspirant, qui raconte les réussites de ces « genres mineurs », comme cela a pu se produire lors des derniers Jeux olympiques et paralympiques.
Nous avons besoin de nous projeter dans un récit de victoires professionnelles de toutes les couleurs et de toutes les natures, sans qu'aucune catégorie ne soit limitée à un couloir de nage.
Pour y parvenir, il suffirait de faire montre de curiosité et de tendre le micro à ces « invisibles » afin d'entendre leur voix et, précisément, les positionner en « role models ». Il y a des millions de gens remarquables dont la société ne parle pas, car ils sont invisibilisés par tous ceux qui ont besoin d'aide. C'est comme si les « victimes » éclipsaient les « invaincus ».
Ce faisant, nous mettons sous silence le sens de leurs efforts, mais surtout l'idée que la réussite est possible, même si les conditions peuvent être très difficiles voire injustes - en particulier pour les femmes issues des minorités visibles qui doivent faire preuve d'une combativité intelligente et disciplinée pour éviter les pièges.
Arc inédit de solidarité sociale
L'égalité devrait être une base fondamentale de notre contrat social, et non pas un régime d'exception pour une partie de la population. Car il est inadmissible de se retrouver à la merci d'actions en justice susceptibles de retourner le droit contre les inégalités des uns au profit d'arguments spécieux, mais diaboliquement efficaces des autres.
Changer de narratif, c'est forger le socle d'une révolution sociétale. De l'imagination suffit pour créer un arc inédit de solidarité sociale qui permette à ceux qui s'en sortent de faire la courte échelle à d'autres (au lieu de capter et de conserver la lumière). De quoi peut-être enfin trouver le chemin naturel vers une diversité inclusive, susceptible alors de nourrir notre imaginaire avec gourmandise.
Nicole Degbo
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La Cabrik est une fabrik de gouvernance stratégique et humaine qui accompagne les transformations pour relier l'économie à l'humain et est spécialiste des situations de crise de gouvernance.