Tous disruptés !
Publications — il y a 4 années
Comment passer de la conscience de ce monde qui vient aux transformations nécessaires pour faire partie de ce monde qui change ?
Dans le cadre de la Gouvernance Tour, une question interroge l’exposition à la disruption des métiers. Et quelque soit la nature du travail, tout le monde y pense ; dans les services financiers, la santé, l’industrie, la gastronomie, la recherche, l’agriculture, la production audiovisuelle, les médias, la mobilité, la politique, l’art, le juridique et le luxe, l’ensemble des métiers se sentent concernés par la digitalisation du travail, même les fonctions à forte valeur ajoutée humaine.
L’impact des GAFA est immense dans la société car il oblige désormais chaque acteur a envisagé le pire ; mais penser le pire n’est pas nécessairement faire preuve d’imagination. Les dirigeants admettent de plus en plus l’hypothèse d’un changement (presque) quantique de leur modèle économique et social à cause de l’incursion des GAFA dans un nombre exponentiel de secteurs d’activité offrant un vrai potentiel de croissance du fait de leur scalabilité possible. Ainsi, les dirigeants reconnaissent que cela pourrait arriver, que cela va même certainement arriver, mais peu savent dire comment, c’est-à- dire de quelle manière leur marché sera réinventé.
Aussi, cette histoire de disruption est d’abord une affaire de pivot mental ; elle oblige chacun, a fortiori les décideurs à comprendre leurs vulnérabilités, leurs angles morts, pour redéfinir leur chaîne de valeur métier et identifier quoi changer, quoi garder, quoi créer, quoi abandonner. C’est donc une course contre la montre pour tenter de disrupter son modèle avant de se faire disrupter.
Le défi de transformation est complexe car il est protéiforme ; le changement est très vulnérable au digital et/ou à la règlementation. Et quand ces deux leviers percutent ensemble un modèle, la rapidité de transformation est vitale, à peine d’être mortelle.
Les entreprises doivent comprendre la mutation à venir de leur marché ; elles doivent penser, imaginer ce qui n’est pas encore arriver pour raconter une histoire et reprogrammer le logiciel culturel de leur croissance. Elles doivent comprendre et anticiper les nouveaux acteurs, les nouvelles attentes et les nouveaux clients du marché. Elles doivent se réinventer contre leurs habitudes pour essayer de les dépasser et créer de nouveaux relais de croissance.
Cette capacité à s’immerger dans le futur, sans le maîtriser, demande beaucoup de courage car le raisonnement est contre-intuitif et demande une grande capacité de lâcher-prise pour oser imaginer l’impossible et surtout accepter l’inconfort structurel que cela provoque. C’est un mouvement permanent entre le passé, le présent et le futur, c’est une pensée rapide et lente, c’est un véritable génie d’inception nourrit par un modèle de questionnement hybride.
C’est aussi une autre manière d’interpréter les compétences de l’entreprise car il s’agit d’accepter qu’un grand nombre de métiers sont en train de changer ; des fonctions vont disparaître, muter ou apparaître. Et, avec cela, des nouvelles compétences vont surgir et surtout les soft skills vont prendre de plus en plus de place dans la réussite de la transformation des organisations. Ces changements vont venir percuter les approches de recrutement actuelles basées encore trop souvent sur le CV et une lecture linéaire et élitiste de l’expérience. Les équipes vont devoir apprendre à lire les compétences de manière non conventionnelle pour deviner la valeur singulière de tout individu, au risque de passer à côté de véritables talents.
Les entreprises y compris les personnes vont vivre la pression grandissante des progrès technologiques sur l’économie et le travail. L’économie de plateforme a un taux d’attrition des emplois vs. l’économie traditionnelle qui pose question ; et, à travers la simplification d’un grand nombre de tâches, le numérique redéfinit le travail et son organisation.
"Rattraper son retard et construire demain" devient le défi fondamental pour une majorité d’entreprises et de travailleurs. Nous allons vers une société mi-tech, mi-humaine qui va demander à l’ensemble des acteurs de changer d’état d’esprit pour évoluer d’un modèle de gestion vers un modèle entrepreneurial agile en tant que salariés, dirigeants, entrepreneurs ou non. Tout le monde va devoir muter et gagner en agilité permanente pour produire sa valeur humaine singulière.
Les entreprises et les personnes vont devoir gagner en résilience ; elles vont être à l’épreuve du changement continu pour gérer une pensée complexe dans un monde agile et en même temps identifier les leviers de simplification du travail et de l’économie.
Ce "en même temps" est une grande bascule qui exige de chacun d’être en position de disrupteur. Ainsi, contribuer à la transformation de la société, de son entreprise et de son travail, c’est d’abord réussir la disruption de soi-même. C’est une révolution cognitive et technologique qui ne cesse de faire tic-tac, tic-tac, tic-tac.