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Société

Tech for good?

Publications — il y a 4 années

Devrons-nous regarder le monde technologique coloniser le moindre pan de notre économie ?

L’entrepreneuriat technologique est impérial ; il est en pole position et impose ses modes. 

Pour commencer, il s’exprime en anglais pour interagir avec le monde de manière universelle. Il ne parle pas seulement anglais à l’étranger, mais également en France. La francophonie en prend clairement un sacré coup. Avons-nous déjà vu les allemands, les chinois, les anglais, les américains, désertés leur langue au profit d’une autre, sur leur propre marché, quitte à être presque inaccessible à près de la moitié des leurs ? 

Le langage n’est qu’un détail, mais il raconte déjà quelque chose. 

Le récit collectif semble fasciné par la frénésie française pour les levées de fonds ; seule compte le montant de la levée. La pertinence de l’idée, la bienveillance du modèle, l’attrition à l’emploi, l’empreinte écologique, le modèle social et la pression économique sur les prix au nom de la scalabilité estimée ne sont que peu regardés.  

Donc, nous avons découvert et appris les mots clefs pour raconter les phases de développement de la start-up : early-stage, amorçage, scale-up, série A, série B, série C, VC, CVC, exit, etc. ; puis, l’excitation pour la phase de scale-up a occupé le terrain et l’espace du langage pendant deux à trois ans ; ensuite, nous avons posé l’idée de la tech for good pour évoluer désormais entre la raison d’être et le modèle d’impact. 

Le sens pénètre peu à peu le cadre du récit à travers des solutions qui veulent changer le monde en imaginant un schéma de résolution de problème innovant (pas toujours), performant (pas toujours), mais particulièrement bien raconté grâce à la dynamique communautaire d’écosystèmes qui communiquent entre eux, se cooptent mutuellement, se soutiennent mécaniquement, par intérêt, par amitié, par effet de mode aussi et, faut l’espérer, aussi quand le succès est bien mérité (heureusement). 

Voilà un schéma caricatural de la start-up nation imaginée par beaucoup de gens étrangers à ce monde précisément ; l’image n’est pas sympathique, elle semble arrogante, déconnectée, avec des sommes qui affolent la machine à calculer du français moyen. 

Cette fracture culturelle est un vrai sujet qu’il va nous falloir gérer pour juguler le choc entre les entrepreneurs et les autres ; ces autres se sentant parfois, sinon souvent, de plus en plus laissés pour compte par le système. 

Le vrai sujet est de trouver par ailleurs le point d’équilibre entre les entreprises traditionnelles qui auront l’ardente obligation de moderniser leur modèle économique et social et l’économie des start-up qui auront le devoir de réguler leur modèle vers un mieux disant social, en dépit de leur engagement pour la tech for good. 

Il serait temps que nous évoquions de manière plus concrète le point de bascule à venir. Quelle est la taille critique de ces nouveaux modèles de croissance reposant sur une plateforme pour porter la solution ? Quel sera l’effectif critique vs. la valorisation supposée de la start-up devenue entreprise ? 

C’est un sujet central pour les nouveaux équilibres. Il y a bien des initiatives ici ou là pour porter un monde tech et responsable, mais il y a le réel. il y a des stagiaires qui servent de salariés avec des salaires ridicules, des salariés avec le statut d’auto-entrepreneur, une reproduction des biais genrés, une absence cruelle de diversité, une pression très forte pour trouver le chemin d’une rentabilité économique rapide pour rassurer les investisseurs et sécuriser les conditions de la prochaine levée et toujours une empreinte écologique qui a vocation à devenir exponentielle ; tout cela, sous un plâtrage humain quand on sait que peu de choses sont véritablement pensées pour incarner la centralité de l’humain, sans parler des innombrables échecs passés sous silence pourvu que l’image de l’entrepreneur reste sexy pour que la machine à fantasmes fonctionne, pour le mieux ou pour le pire. 

Au départ, l’enjeu humain est le degré 0 des préoccupations (trop souvent) ; la priorité est d’être en capacité de communiquer sur un advisory board de qualité, photos à l’appui sur les réseaux sociaux pour montrer que tout va bien et que l’entreprise est non seulement dans le coup, mais qu’elle a le vent en poupe. 

À quelques rares exceptions près, ce monde est une comédie humaine cynique financée par des fonds d’investissement qui s’engagent pour la tech for good en donnant religieusement la priorité à l’investissement digital au nom d’une doxa économique articulée autour de la perspective d’une multitude des profits. 

Est-ce à dire que demain, ces modèles auront la préférence des environnements publics et privés ? Si oui, cela va être un défi sans précédent pour le travail, et plus spécialement pour l’emploi et par capillarité pour le financement de la retraite. 

Il ne s’agit pas d’avoir une vision manichéenne de la tech, mais de porter un regard lucide sur la manière dont ce nouveau paradigme fait changer la société. La technologie est paradoxale ; elle facilite la proximité et la solitude ; elle est participative et rend servile ; elle permet une personnalisation inédite dans un mouvement parallèle de réification ; elle augmente le pouvoir d’achat et vulnérabilise un grand nombre d’entreprises. Elle réveille l’écosystème et présente, en même temps, un risque d’anéantissement de l’ancienne économie. 

Le monde tech nous rend de multiples services, mais il crée de la joie et de la peur. Or, il va nous falloir vivre avec cela et accepter que cela va durer longtemps. Nous sommes partis pour l’éternité technologique. Et, par-delà les postures ou les effets d’annonce, une régulation pragmatique, éthique et sociale sera inévitable.

La Cabrik est une fabrik de gouvernance stratégique et humaine qui accompagne les transformations pour relier l'économie à l'humain et est spécialiste des situations de crise de gouvernance.

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