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Transformation - Innovation - Gouvernance - Culture - RH

Transformation

L'irrésolue (transformation)

Publications — il y a 5 années

Temps de lecture: 3 minutes

"Penser, ce n'est pas unifier, rendre familière l'apparence sous le visage d'un grand principe. Penser, c'est réapprendre à voir, diriger sa conscience, faire de chaque image un lieu privilégié."  Albert Camus

Ce courage réflexif est un des défis les plus difficiles de la transformation ; réussir sa transformation au-delà des idées demande du courage, un courage solitaire avant d’être collectif. Une des grandes difficultés est que chacun recule pour ne pas avoir raison tout seul, contre tous.

C’est ainsi que les entreprises s’engagent ardemment dans une transformation irrésolue ; elles se persuadent d’avoir des idées neuves avec du vieux, des trop petits pas et surtout elles évitent les vrais débats, âpres et abrasifs au nom du conformisme, par peur de perdre quelque chose et par manque d’imagination.

1

Conformisme

Le conformisme est un des ressorts de la pensée de groupe. C’est un conservatisme collectif qui entraîne l’expression d’un point de vue homogène en dépit des désaccords de fond. La concorde est apparente et superficielle, mais suffit à tromper le collectif qui ne prend aucune position critique. C’est le jeu de la pression sociale au sein de l’entreprise qui réduit à néant la pensée différente. Ceux enclins à exprimer une opinion contraire guettent l’expression d’une parole libre chez les autres, pour ouvrir un débat contradictoire. Et, quand personne ne se lance, personne n’ose exprimer sa voix, car rares sont alors les intrépides de la parole.

Ce biais de groupe donne l’illusion d’un alignement stratégique et provoque de fait une altération mutuelle de la perception de l’environnement. L’idéation est alors bloquée au profit des pensées plates qui ne font courir aucun risque à personne. D’aucuns habillent ce courage à front bas de quelques variétés qui ne trompent personne, mais qui trompent tout le monde. L’ambition véritable devient alors silencieuse et confuse, mais personne n’interpelle la verticalité du cap, sa dimension performative, son intention de créer de la valeur et sa réelle puissance de transformation. 

C’est alors que cette conformité normative qui se justifie par la culture du pouvoir, de la contradiction, de l’erreur, de la peur et du chef doit précisément être challengée par le chef. C’est à ce moment-là que le chef doit ranger son ego et son illusion d’emprise pour aller se confronter au réel et aller chercher la vérité des contradictions afin d’avoir un dialogue à la hauteur du rôle normalement dévolu au numéro 1. Sinon, l’inévitable question devient celle de la valeur d’une équipe de dirigeants qui ne sait pas penser contre elle-même.

2

Peur du sacrifice 

En sus du conformisme s’ajoute souvent la peur, celle du sacrifice ; il s’agit de la peur de se tromper, de la peur de perdre son pouvoir, voire pire, son poste et donc son statut social. Mais il y a aussi la peur de s’opposer, de défier l’autorité du chef pour aller vers une exigence commune et collective. Cette peur à la fois rationnelle et irrationnelle vient à sacrifier l’excellence collective qui renonce chaque jour au courage de s’imposer une pensée et une action disciplinées pour aller au-devant de la réussite de la transformation tant espérée. 

Ce découragement choisit trop souvent de sacrifier le collectif au profit de petits arrangements personnels. Combattre ce biais collectif implique un désir général et raisonné de lâcher-prise pour commencer enfin à explorer les trajectoires dites impossibles pour partir à la conquête du génie collectif. Cela veut dire perdre le désir de contrôle pour laisser le champ libre aux émergences créatives. La démarche n’est pas si simple, car elle implique un environnement de confiance. Elle signifie acter les intelligences humaines et respectives, la compréhension de l’urgence d’aller quelque part, un ailleurs différenciant et durable, le principe que l’impossible peut être le possible ; acter tout cela donc, pour commencer l’aventure. 

Lâcher-prise pour partir à la découverte de la réussite est un acte d’espérance et en même temps une expérience vertigineuse ; c’est une épreuve mentale qui conduit souvent en terre inconnue, car il s’agit de comprendre les freins à la confiance pour identifier les leviers efficaces pour donner la permission aux équipes d’explorer le possible, le difficile, mais possible et enfin l’impossible. 

Une entreprise qui impulse une dynamique de lâcher-prise doit être au clair avec les bénéfices immédiats et les préjudices futurs de même qu’avec les préjudices immédiats et les bénéfices futurs. Qu’est que l’entreprise gagne à découvrir son génie ? Qu’est ce que le collectif gagne à se faire confiance ? Comment gérer l’incertitude de l’inconnu ? 

3

Manque d’imagination 

La culture de la transformation est indissociable d’une certaine dose ou d’une dose certaine d’imagination. Il faut que l’entreprise soit permissive avec le jeu. Elle doit encourager la culture du gaming mental et expérimental pour tester les idées puis apprendre individuellement et collectivement pour choisir les idées à poursuivre ou à abandonner avec un niveau de curseur élevé sinon, ce n’est pas drôle. 

La conquête de la confiance est donc scellée à celle de la liberté. La liberté d’entreprendre, de faire, d’oser ne pas faire, d’explorer des nouveaux chemins, de sortir du cadre, de débattre, de penser différent, de laisser l’inattendu jaillir. La réussite de la transformation est une merveilleuse conquête de liberté pour aller et venir, casser les codes, les moeurs, les tristes habitudes pour partir au défi de l’inattendu. 

Il faut donc forger la pensée de groupe selon laquelle la transformation ne peut pas être l’agrégation de pensées convenables. La transformation n’est pas convenable, ça ne se peut pas ; qu’elle soit incrémentale ou de rupture, la transformation est un tremblement de terre ou une éruption volcanique. La transformation fait vaciller la réalité ; elle ne peut pas être une liste catalogue de symboles alibis qui rassurent qui l’ego, qui les peurs, qui la lâcheté, qui le défaut d’imagination.

Ainsi la réussite de la transformation relève de la qualité de l’équipe et d’une exemplarité contagieuse qui met en échec le nivellement par le bas. La transformation doit être exigeante pour faire rempart au ressac de la peur qui empêche tout. 

Le chef doit choisir entre le récit de la transformation ou d’une contre-transformation : avancer ou reculer en somme. Le choix est simple.   

Nicole Degbo 

Article publié dans Les Echos, à lire ici.

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S'extraire des soubresauts du temps court.

Fernand Braudel