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Retraite - Travail - Intelligence Artificielle _ Intelligence Humaine - Carrière -

La vie du travail

Publications — il y a 4 années

Notre vision de la retraite raconte quelque chose de notre vision du travail.

La réforme des retraites ne raconte pas une belle histoire du travail ; l’allongement de la vie du travail apparaît brutal pour un grand nombre de travailleurs tandis que la pénibilité est un levier de négociation pour diminuer le temps du travail. 

Les "opposants" luttent contre le travail car l’idée de le faire battre en retraite est une victoire ; comme si le travail était une punition, la punition d’une vie. 

Nous sommes très loin de projeter des valeurs positives et inspirantes autour du travail. Et tout le monde s’y met, les passionnés autant que les non passionnés, ceux qui ont trouvé leur vocation et les autres. Cette réforme (presque avortée) est une grande dispute avec le travail et cela murmure quelque chose : l’évidence que le travail manque de soin pour produire tant de souffrance et de désir de non-travail. 

Les policiers, les ouvriers, les danseurs, les femmes de ménage, les soignants et la liste est interminable ; chaque profession met son lot de souffrance en jeu pour légitimer son besoin, voire son droit à partir plus tôt. 

Pendant ce temps, le taux de chômage des plus de 50 ans est une tragédie : le taux de chômage des plus de 50 ans a triplé entre 2008 et 2019 et parmi les 60-64 ans, ceux qui perçoivent l’allocation adulte handicapé ont augmenté de 192% depuis 2010 ; et selon la DARES, 40% des personnes interrogées disent ne pas se sentir capables de faire le même travail jusqu’à 60 ans ou jusqu’à l’âge de la retraite. 

Les acteurs sociaux négocient cette souffrance exprimée pour tenter de faire reculer le gouvernement ; mais, le vrai problème est bien celui de la monotonie du travail ; le véritable scandale est notre incompétence à rendre le travail plus intelligent et notre passivité collective à accepter l’immobilisme des carrières. 

Bien-sûr, la digitalisation progressive des robots va achever d’éliminer la part encore pénible des métiers anciens ; mais qu’en sera-t-il des nouveaux métiers ? L’intelligence du travail est et restera sans doute un sujet intemporel. De même qu’aujourd’hui ceux qui font un métier qualifié par certains d’ingrat réclament la reconnaissance de la dureté - très souvent physique - de leur travail ; et, les travailleurs du click ou les nouveaux prolétaires du numérique vont être en attente de la reconnaissance de la pénibilité psychique de leur travail. Mais dans les deux mondes, les arcs de la pénibilité physique et psychique peuvent se rejoindre et alors le drame du travail se cristallise dans cette double peine. 

Les dirigeants, les managers et les ressources humaines doivent à la faveur d’une union sacrée accompagner chaque travailleur à penser son travail avec sens ; il serait bon que chaque travailleur soit convaincu de son utilité à travers son autonomie, la confiance qui lui est accordée, la considération dont il bénéficie et dont l’expression est à la fois matérielle et immatérielle. Le travailleur utile crée toujours de la valeur car il se sent concerné. Et l’intelligence du travail ne se décrète pas ; c’est au minimum l’agrégation de leviers managériaux, mentaux, cognitifs, en passant par la fabrique de la décision et la culture de la responsabilité. 

Ensuite, la gouvernance du capital humain et notamment le management des carrières est un sujet central car elle définit la notion de talent, de mérite, de reconnaissance et murmure quelque chose autour du respect et de la considération des travailleurs. Le management des carrières parle d’égalité, de parité, de diversité, d’inclusion ou pas. Elle est une célébration du travail ou une destruction du sens même du travail. 

C’est important car ces enjeux forgent la notion même de progrès au cœur du travail ; le poids de ces problématiques structurent le contrat social qui lie l’entreprise à ses salariés. C’est la raison pour laquelle, l’entreprise doit porter à nouveau de la considération à la vie de tous les travailleurs ; elle doit apprendre à repenser le cycle des métiers, à l’aune de la compétence plus que de l’expérience ; elle doit réinvestir le champ du potentiel ; elle doit faire vivre son capital immatériel pour construire des plans de succession en cohérence avec la stratégie de l’entreprise ; elle doit également accepter de se faire bousculer par l’intelligence des équipes pour explorer de nouveaux chemins à l’ère de cette révolution digitale qui bouge toutes les lignes connues jusqu’à aujourd’hui. 

L’entreprise doit faire cesser cette monotonie du travail qui consiste à enfermer un travailleur dans un métier jusqu’à la fin des temps ; elle doit cesser d’organiser la réification des travailleurs au nom d’une rentabilité financière imbécile. Elle doit se convertir à l’idée qu’une somme de travailleurs assurés de leur intelligence et par capillarité de leur utilité produit une croissance intelligemment tonique et naturelle. 

Cette réforme des retraites doit entraîner une réflexion de fond sur la gouvernance du travail car il nous faut reconstruire un affect plus sain avec lui. Certes, tout le monde de sera pas comme Roger Federer qui repousse sans cesse et avec ingéniosité les limites de son corps pour rester sur le court de tennis au-delà de la retraite usuelle ; comme ces musiciens virtuoses qui jouent jusqu’à leur dernier souffle ; comme ces dirigeants d’entreprise ou politiques qui ne veulent pas renoncer au travail car ils voient la retraite comme une petite mort ; ou encore comme ces designers de haute-couture qui tirent leur révérence quand la passion ou la vie n’est plus. Non, tout le monde ne trouvera pas un sens aussi puissant dans sa vie professionnelle, mais il y a une belle marge de progression entre le crépuscule et la vie des étoiles. À nous, individuellement et collectivement, de faire swinguer la vie du travail.

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Si tu veux être heureux ; être un homme libre ; laisse les autres te mépriser.

Sénèque