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Gouvernance - Management - People - Engagement - Dirigeants - Injonctions paradoxales - sens

Management

Désalignés

Actualités — il y a 4 années

Comment produire du sens ?

Le manager est trop souvent un passeur d’absurde.

Manager est une science difficile. Il y a encore quelques années, c’était un signe de reconnaissance sociale. Depuis l’émergence du digital, les modes de travail ne cessent d’évoluer et les managers doutent alors même que les notions de sens et de liberté sont réapparues dans le vocabulaire oral de l’entreprise.

Les salariés veulent croire dans quelque chose, au minimum dans ce qu’ils font et ils veulent avoir le droit de réinvestir leur intelligence, toute leur intelligence pour se sentir utiles.

Et la génération des millenials ne s’est pas embarrassée de diplomatie pour affirmer ses désirs et mettre un peu plus en lumière les injonctions paradoxales qui créent des nœuds quotidiens dans la bonne exécution de la mission du manager.

Avant, l’irrationnel s’articulait autours des objectifs de performance et des moyens alloués pour réussir. Très souvent, les directives avaient vocation à tordre le cou de l’humain pour produire des points de marge. Aujourd’hui, les enjeux de rentabilité sont toujours là, mais pire encore, la question de la durabilité de l’entreprise s’ajoute à la pression à cause de la digitalisation de l’économie qui a un impact réel et massif sur le travail. Les nerfs des dirigeants sont mis à rude épreuve car il y a cette injonction d’innovation pour inventer un nouveau modèle de croissance qui s’inscrit de manière contre-intuitive avec les pratiques habituelles de management et dont la menace est celle d’une épée de Damoclès qui se rapproche à grande vitesse.

Cet inévitable danger accentue le degré d’absurde en entreprise ; a fortiori quand il est actuellement de bon ton de se draper dans un langage humain au nom du rôle social de l’entreprise.

Sauf que sur le terrain, la réalité est trop souvent autre. Les managers sont en lutte avec eux- mêmes car ils mesurent régulièrement la distance entre l’énoncé et le réalisé ou plutôt l’écart entre le marketing, la communication et le réel.

Et, ce tiraillement entame inévitablement le socle de valeurs qui les lie à l’entreprise. Ils ont dû mal à porter et incarner des paroles vides de sens. Aussi, petit à petit, sans nécessairement être en rébellion, ils sont souvent en dissidence passive avec les valeurs prônées de l’entreprise ; ils défendent ainsi de moins en moins l’indéfendable.

Cela vient s’ajouter à une culture d’entreprise qui est rarement alignée avec les ambitions définies par l’entreprise : l’excellence est en lutte avec la politique des talents ; l’agilité se heurte aux normes de l’entreprise ; l’innovation est étouffée par la faiblesse des dialogues abrasifs ; quant à l’humain, il est à l’image du manque de courage des organisations.

Voilà donc des managers dont l’engagement est régulièrement fragmenté à cause des valeurs et d’une culture d’entreprise manquantes, et qui doivent par ailleurs communiquer avec loyauté sur les décisions absurdes de l’entreprise ; voilà des managers qui doivent parler de performance quantitative quand la logique serait aussi de parler de performance qualitative. Voilà des managers qui doivent faire le récit des ambitions stratégiques de dirigeants qui coupent par ailleurs les budgets pour satisfaire à ces mêmes objectifs ; voilà des managers qui félicitent leurs équipes pour leurs résultats et annoncent dans un même temps une réduction des effectifs ; voilà des managers qui refusent des augmentations à des collaborateurs engagés et méritants tandis que l’entreprise engage des budgets monstrueusement indécents en consulting ; voilà encore des dirigeants dont la base doute, mais qui se voient verser des salaires incohérents au regard de leur faible performance dans la gouvernance de l’entreprise.

La somme de l’absurde consommé en entreprise est une fabrique de désalignement. Elle demande aux managers d’être en première ligne pour porter une gouvernance manquante. Elle demande aux managers de contourner les jeux politiques de leur ligne hiérarchique supérieure pour tirer le meilleur de la ligne hiérarchique inférieure. Elle demande aux managers de concilier des intérêts qui sont loin d’être souvent les mêmes sans se plaindre et gesticuler car après tout, ils ont de la chance d’être managers ; sauf que désormais 79% des salariés ne veulent pas être managers.

Alors comment réhabiliter la fonction managériale ? Comment lui redonner du sens ? Comment convaincre l’entreprise à produire moins d’absurde ? Peut-être que faire confiance aux collaborateurs, apprendre à partager le pouvoir et ranger son ego au profit du collectif seraient un bon début ?

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Le futur appartient à ceux qui voient les possibilités avant qu'elles ne deviennent évidentes.

Theodore Levitt